Les crypto-monnaies ont gagné beaucoup de visibilité au cours des dernières années. Le bitcoin a atteint son plus haut niveau en cinq ans en novembre 2021. Il est donc compréhensible que de nombreux musulmans s’y intéressent. L’islam a des lois financières strictes et, comme les crypto-monnaies sont très récentes, il peut être difficile d’interpréter la charia concernant ce type de monnaie.
Selon de nombreux savants, les cryptomonnaies sont haram du fait de leur nature speculative, leur utilisation pour des fins illégales, l’absence de régulation officielle et le fait qu’elles ne soient pas largement acceptées comme moyen de paiement.
Veuillez noter que ce site n’est pas une autorité religieuse sur le sujet, il ne fait que synthétiser les résultats des recherches des savants. Si vous voulez être certain que l’investissement en cryptomonnaies sont halal ou haram, nous vous recommandons de consulter une autorité religieuse pour répondre directement à la question ou faire vos propres recherches.
Les déclarations des savants sur les cryptomonnaies
Aujourd’hui, de nombreux érudits et juristes islamiques, ne considèrent pas les crypto-monnaies comme halal pour diverses raisons.
Le secrétaire général de l’IUMS Ali al-Qaradaghi
Ali al-Qaradaghi est le secrétaire général de l’Union internationale des savants musulmans (IUMS). L’IUMS est un organisme représentatif composé d’un large éventail de savants musulmans. Créée par Yusuf al-Qaradawi en 2004, c’est une organisation qui représente des savants de 80 pays, principalement de la région du Golfe.
En février 2022, Ali al-Qaradaghi a publié une brève fatwa en vidéo concernant les crypto-monnaies. Il affirme que l’absence de soutien de l’État et le manque de valeur intrinsèque des crypto-monnaies signifient qu’elles ne peuvent être considérées ni comme une monnaie ni comme une valeur de crédit, et qu’il s’agissait d’un algorithme plutôt que d’une réelle propriété (ḥaqq mālī). Il a appliqué la plus légère des catégories d’interdiction (taḥrīm al-wasāʾil) concernant l’investissement dans les crypto-monnaies, car il ne s’agissait pas d’une question d’intérêt (riba) mais de protection de la propriété (ḥifāẓa ʿalā māl) des musulmans. Dans le même temps, al-Qaradaghi a appelé les pays islamiques à adopter les crypto-monnaies en les émettant – leur accordant ainsi le soutien de l’État – et en créant un système autour.
Source: https://beta.shariasource.com/documents/4449/
L’actuel grand mufti d’Égypte Shawki Allam, président de Dar el Iftaa
Le Dar al-Ifta al-Miṣriyyah est l’organe de recherche juridique islamique en Égypte. Il émet des fatwas sur des questions quotidiennes et contemporaines. Il est présidé par Shawki Allam depuis Février 2013.
Dans sa fatwa issue en 2017, le mufti dit: « À mon avis, l’achat et vente des crypto-monnaies est haram. Elles ne sont pas approuvées par des organismes officiels, tels que les départements du Trésor des états, comme un moyen d’échange acceptable. Ces monnaies facilite les commerces illégaux, de blanchiment d’argent, et elles s’apparentent à des jeux d’argent ».
Source : https://beta.shariasource.com/documents/4450
Le mufti Taqi Usmani, ancien juge de la cour suprême du Pakistan
« Les monnaies sont à l’origine un moyen d’échange, et en faire une marchandise négociable pour gagner du profit est contraire à la philosophie de l’économie islamique. Dans la charia, il n’y a aucune raison valable d’accepter le bitcoin ou d’autres crypto-monnaies comme une monnaie. Ce n’est qu’un nombre imaginaire, qui est généré par un processus mathématique complexe. Il est acheté pour des jeux d’argent ou des spéculations, et utilisé dans des transactions illégales ou illicites ».
La Direction des affaires religieuses Turque
« Puisque les crypto-monnaies sont ouvertes à la spéculation, principalement utilisées pour des actes illégaux, et en dehors de la surveillance de l’État, leur échange n’est pas approprié à ce stade, à la lumière de la charia. »
Les raisons de l’interdiction
On identifie ainsi 5 principales raisons pour lesquelles la cryptomonnaie est jugée haram :
- L’incertitude
- La spéculation : la cryptomonnaie est un investissement à haut risque semblable aux paris
- La non régulation : la cryptomonnaie n’est pas régulée par les gouvernements ou par des organismes financiers
- Transparence : la cryptomonnaie est utilisée comme moyens de paiements pour des activités illégales
- La cryptomonnaie n’est pas utilisée comme une monnaie
L’incertitude
Contrairement aux monnaies standard que l’on détient dans le pays dans lequel on vit, le prix des crypto-monnaies est déterminé par l’offre et la demande (l’euro l’est également mais comme l’on vit en europe nous sommes pas impactés par les fluctuations de l’euro). De ce fait, il s’agit d’un marché extrêmement volatile qui peut monter et descendre très rapidement. En novembre 2021, un bitcoin valait près de 65 000 $, 6 mois plus tard sa valeur avait chuté à moins de 29 000$.
L’un des principes clés de l’islam est d’éviter l’incertitude et le risque excessif. Cependant, la nature de la cryptomonnaie est très volatile et son prix peut fluctuer considérablement en peu de temps. Les investisseurs peuvent subir des pertes importantes en raison de ces fluctuations. Cela peut rendre la cryptomonnaie incompatible avec les principes islamiques de la gestion du risque.
La spéculation : la cryptomonnaie est un investissement à haut risque semblable aux paris
Un autre argument contre l’utilisation de la cryptomonnaie dans l’islam est qu’elle peut encourager la spéculation et le jeu de hasard. La spéculation consiste à essayer de tirer profit de l’augmentation du prix d’un actif, sans se soucier de sa valeur intrinsèque. Le jeu de hasard implique un pari sur l’issue incertaine d’un événement. De nombreux investisseurs dans la cryptomonnaie cherchent à réaliser un profit rapide en spéculant sur le prix de la cryptomonnaie sans se soucier de sa valeur réelle. Cela peut être considéré comme un comportement spéculatif et risqué, qui est interdit en islam.
Acheter des crypto-monnaies à des fins d’investissement est donc très proche des jeux d’argent, qui sont interdits par l’islam.
Non utilisée comme une monnaie
Cette papier décrit les crypto-monnaies comme ayant « des limites pour être considérée comme de la « monnaie ». La monnaie peut être échangée contre des biens et des services, tandis que la crypto est plus souvent un investissement. Les banques traditionnelles nous le montre également. Beaucoup délaissent le terme de crypto-monnaie au profit de celui de crypto-actifs, pour faire la distinction entre l’argent et la crypto.
Selon l’islam, la monnaie doit être basée sur des actifs physiques. Elle peut être utilisée pour payer tout ce dont vous avez besoin. Si vous ne pouvez pas utiliser le bitcoin pour payer vos courses alimentaires, elle ne peut être considérée comme une véritable monnaie.
Ce point de vue n’est pas partagé par tous les musulmans, il reste à determiner si les crypto-monnaies sont de vraies monnaies, un actif numérique ou ni l’un ni l’autre.
Transparence : la cryptomonnaie comme vecteur d’activités illégales
Un autre argument contre la cryptomonnaie est lié à son manque de transparence. Étant donné que les transactions de cryptomonnaie sont anonymes et non réglementées, il peut être difficile de vérifier la source de la cryptomonnaie et les personnes impliquées dans une transaction. Cela peut conduire à des transactions illicites ou frauduleuses, ce qui n’est pas conforme aux principes de l’islam qui encourage la transparence et la responsabilité dans les transactions.
Non régulation : la cryptomonnaie n’est pas régulée par les gouvernements ou organismes financiers
Certains musulmans sont ouverts à l’idée que les crypto-monnaies soient acceptées dans l’islam si elles sont mieux réglementées par les gouvernements et les organismes financiers. Par exemple, la réglementation pourrait permettre aux gouvernements et aux banques de traiter les crypto-monnaies comme des devises – l’échange de devises étrangères (crypto) en monnaie locale (espèces).
En théorie, cela pourrait réduire l’incertitude et le risque entourant la crypto. De nombreux pays – dont les États-Unis – commencent à introduire des réglementations autour des crypto-monnaies. Mais jusqu’à présent, aucun pays à majorité musulmane n’autorise les crypto-monnaies pour les transactions légales.
Mot de la fin
De nombreux érudits islamiques semblent s’accorder sur le fait que, dans l’état actuel des choses, les crypto-monnaies sont haram et doivent être évitées par les musulmans.
Ce n’est cependant pas l’intégralité des avis sur la question. Il existe en effet des savants qui considèrent que, par exemple, le bitcoin est une véritable monnaie. Ils recommandent aux musulmans de vérifier chaque projet avant de d’y investir. L’achat de crypto-monnaies s’apparente ainsi à l’achat d’actions, mais avec des niveaux de risque et d’incertitude beaucoup plus élevés.
Nous développerons ces avis dans un autre article.
Les autres actifs dans lesquels il est autorisé d’investir sont décrits dans cet article: Dans quoi est-il halal investir.